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Le diabète et ses complications sur la vision et l’audition

Plus de 4 millions de personnes en France sont diabétiques, selon l’Assurance maladie. Quand le taux de sucre dans le sang joue aux montagnes russes, cela peut provoquer bien des complications. Les yeux des diabétiques, notamment, sont particulièrement vulnérables. Endocrinologue au CHU de Rennes, le Pr Fabrice Bonnet fait le point sur le sujet.

Chez les diabétiques de type 1, le pancréas ne fabrique plus d’insuline, hormone régulant le taux de glucose (sucre) dans le sang Le traitement repose alors sur des injections sous-cutanées d’insuline, plusieurs fois par jour. Chez les diabétiques de type 2 (90% des diabétiques), l’insuline est mal utilisée par les cellules de l’organisme, ce qui finit par entraîner un excès de sucre dans le sang. Ce que mangent les patients, comment ils bougent, leur niveau de stress, leur sommeil… font monter ou descendre leur taux de glucose dans le sang. Pour garder leur glycémie sous contrôle, la Haute autorité de santé (HAS) fait des patients des acteurs de leur traitement. D’abord, en les incitant à plus bouger, l’exercice physique améliorant remarquablement la sensibilité à l’insuline. Ensuite, en mangeant équilibré. Quand les modifications de l’hygiène de vie ne sont pas suffisantes pour équilibrer la glycémie, le médecin peut prescrire des médicaments. Suivre toutes ces mesures peut éviter bien des complications. Car à long terme, une hyperglycémie chronique se révèle à haut risque. Quand le sucre apporté par les aliments reste trop longtemps dans le sang au lieu de pénétrer dans les cellules, cela abîme les nerfs et les vaisseaux, et peut avoir des répercussions sur plusieurs organes. Notamment le cœur, les reins, les pieds, les yeux et jusqu’aux oreilles.

 La rétinopathie diabétique, agir avant qu’il ne soit trop tard

« Les diabétiques doivent voir l’ophtalmologiste au moins une fois par an, même en l’absence de symptômes », conseille le Dr Bonnet. Ce spécialiste pratique un fond d’œil, parfois une angiographie rétinienne, mesure l’acuité visuelle, et la tension oculaire. Car un ennemi peut menacer leur vision : la rétinopathie. « C’est l’excès de sucre dans le sang qui, à long terme, peut favoriser des altérations et notamment des micro-anévrismes sur la rétine, fine membrane qui recouvre la partie arrière de l’œil. » Au-delà de l’hyperglycémie chronique, d’autres facteurs peuvent aggraver les lésions. Comme une hypertension artérielle non contrôlée qui peut, elle aussi, abîmer les vaisseaux sanguins de la rétine, ou un taux de cholestérol élevé, à cause des dépôts graisseux dans les vaisseaux, qui diminuent l’apport sanguin vers la rétine. « La rétinopathie est insidieuse. Elle peut longtemps passer inaperçue », alerte le Dr Bonnet. Certains signes peuvent mettre sur sa piste : des lettres déformées à la lecture, des difficultés à passer de la lumière à l’obscurité… Mais, le plus souvent, elle débute en silence. « On peut être atteint de rétinopathie alors même qu’on garde une bonne acuité visuelle. » Mais dans l’ombre, elle peut faire bien des dégâts. Peu à peu, des zones étendues de la rétine sont touchées. La macula, où se situe le centre de la vision, finit par être atteint si rien n’est fait. Cela peut provoquer un œdème maculaire, comme un gonflement du centre de la rétine, entraînant une baisse d’acuité visuelle. Les saignements peuvent aussi entraîner un décollement de la rétine et une hémorragie du vitré, exposant au risque de malvoyance. « La rétinopathie diabétique est une des principales causes de malvoyance, voire de cécité, quand elle est prise en charge trop tardivement. » Un check up régulier permet de traiter le problème à ses tout débuts, pour éviter qu’il ne s’aggrave. « Si la rétinopathie est détectée à un stade plus avancé, des injections intravitréennes peuvent soigner les œdèmes maculaires, et le laser peut stopper la prolifération des néovaisseaux. » Pratiqué sous anesthésie locale grâce à des gouttes, ce geste diminue ainsi le risque de saignement.

D’autres atteintes des yeux

La rétinopathie diabétique n’est pas la seule complication oculaire que doivent affronter les diabétiques. « La cataracte et le glaucome sont aussi plus fréquents en cas de diabète. » La cataracte se traduit par une opacification du cristallin. Si elle a longtemps privé de la vue, partiellement ou totalement, une proportion importante des plus de 70 ans, désormais, c’est la chirurgie la plus pratiquée en France. Le cristallin opacifié est remplacé par un autre, artificiel. Quant au glaucome, il se traite souvent avec des collyres. Quand cela ne suffit pas, le laser ou la chirurgie vont faire baisser la pression dans l’œil. La chirurgie est aujourd’hui moins invasive, grâce à des microstents implantés pour filtrer l’humeur aqueuse. Si ces traitements ne permettent pas de récupérer la vision qui a été perdue, ils stabilisent la maladie.

Des effets aussi sur l’audition

Plus inattendu, « le diabète, quand il est mal équilibré, est susceptible d’accélérer le vieillissement auditif. » Pourquoi ? Parce que l’hyperglycémie pourrait, à long terme, endommager les minuscules vaisseaux sanguins qui alimentent l’oreille interne. Or, les cellules ciliées en ont besoin pour être en bonne santé. « C’est une incitation de plus à équilibrer son diabète. » Car quand le taux de glycémie est sous contrôle, les personnes diabétiques ont une acuité auditive similaire à la moyenne de la population de la même tranche d’âge. En cas de doute (difficulté à entendre dans le bruit, répétition, augmentation du son de la télévision…), il est important de prendre rendez-vous avec un ORL, pour évaluer son audition.

Toutes ces complications ne sont ni systématiques, ni inéluctables. Mais pour prévenir au maximum leur apparition, ou leur aggravation, le contrôle de la glycémie est absolument essentiel.