Lunettes de soleil : un bouclier essentiel pour nos yeux

Si l’on pense aisément aux dangers pour notre peau d’une exposition trop prolongée au soleil, on oublie souvent les conséquences pour nos yeux. Pourtant, les rayons ultraviolets (UV) ne leur font aucun cadeau. L’AsnaV (Association Nationale pour l’Amélioration de la Vue) tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme dans son Baromètre de la santé visuelle 2025, publié le 12 juin, et indique la marche à suivre pour se protéger. Explications.
Mettre de la crème pour protéger sa peau des rayons UV est devenu un réflexe pour beaucoup de Français. Les yeux bénéficient-ils des mêmes attentions ? Pas toujours, déplore l’AsnaV. La faute, notamment, à des idées reçues qui continuent de circuler. Son baromètre*, réalisé par OpinionWay, montre par exemple que 4 Français sur 10 pensent que des verres foncés suffisent à les protéger. Or, la teinte n’a rien à voir avec la qualité du filtre UV.
Pourquoi il est essentiel de distinguer teinte et protection UV ?
Attention à ne pas confondre la teinte d’un verre avec sa capacité à bloquer les UV ! Beaucoup pensent, à tort, que plus un verre est foncé, plus il protège les yeux. En réalité, « ce n’est pas la couleur du verre qui protège, mais le traitement appliqué pour bloquer les UV », rappelle Véronique Morin, responsable pédagogique et scientifique en santé visuelle à l’AsnaV. Autrement dit, des verres très sombres peuvent être inefficaces s’ils ne bloquent pas les UV, tandis que des verres clairs -voire transparents- peuvent parfaitement filtrer ces rayons invisibles. La couleur du verre joue uniquement sur la quantité de lumière visible filtrée (et donc sur le confort en plein soleil), mais ce n’est pas elle qui bloque les UV. La teinte du verre est affichée par un chiffre, de 0 à 4. « Le numéro affiché indique à quel point les lunettes protègent de la luminosité. Les verres de catégorie 0, 1 et 2 sont les plus clairs, les moins filtrants. Ils conviennent quand le temps est nuageux, ou pour un usage esthétique. » Les verres de catégorie 3 sont plus foncés. « On peut les utiliser au quotidien, pour se promener en ville, aller à la plage… » Les verres de catégorie 4, eux, sont encore plus foncés. « Ils sont recommandés pour les conditions extrêmes à la montagne et à la mer. Mais ils sont interdits pour la conduite. » Trop sombres, ils peuvent en effet être dangereux dans cette situation. La protection contre les UV est apportée par un traitement spécifique appliqué au verre -qu’il soit foncé, clair ou même transparent. Il peut s’agir soit d’un additif absorbant intégré à la surface du verre, soit d’un film de surface qui bloque les rayons UV. La confusion entre teinte et protection n’est pas anodine. Elle peut conduire à une fausse sensation de sécurité (quand une personne porte des verres sombres), et donc à une exposition accrue… avec des conséquences potentiellement durables.
Comment être sûr d’être bien protégé contre les UV ?
Il ne faut donc pas se fier à l’apparence du verre : s’il est sombre, il protège forcément de la luminosité… mais pas toujours des UV. Pour s’assurer de cette protection, il faut vérifier le marquage CE. Ce logo, apposé de façon indélébile et bien visible sur la monture, garantit que les lunettes répondent à des normes précises en matière de filtration UV et de qualité optique. Elles doivent aussi être accompagnées d’une notice en français précisant la catégorie de filtre. La notice doit mentionner qu’il y a une protection UV à 100%. Cela doit être signalé avec une des mentions suivantes : « protection UV 400 » (la norme de protection la plus stricte), « 100% protection UV », ou « filtration 100% UV ». Deuxième critère : la forme de la monture. Pour être efficaces, les lunettes doivent être bien enveloppantes. Les rayons UV peuvent pénétrer par les côtés ou par le bas si les verres sont trop petits ou mal ajustés. Préférez des modèles larges, proches du visage, avec des branches épaisses si possible. Enfin, méfiance : les lunettes bon marché ou les contrefaçons peuvent ne pas offrir une véritable protection contre les UV. Elles se contentent souvent de simples verres teintés, ce qui est trompeur. En effet, ces verres foncés donnent une impression de sécurité, mais sans filtre UV, ils sont dangereux : la baisse de luminosité provoque une dilatation des pupilles, laissant pénétrer encore plus de rayons UV nocifs dans les yeux.
La lumière, nécessaire à petite dose
« Nous avons besoin de lumière naturelle », reconnaît Véronique Morin. Elle est notamment utile pour synchroniser les rythmes éveil/sommeil. « Elle favorise aussi une bonne croissance des yeux des enfants. » Mais comme souvent, c’est la dose qui fait le poison. « Une exposition excessive peut, à court terme, provoquer un éblouissement, une baisse temporaire de l’acuité visuelle – très gênante, par exemple, en voiture. D’où l’intérêt de faire rempart avec des lunettes aux verres teintés, adaptés aux conditions extérieures. À plus long terme, les UV accélèrent le vieillissement de l’œil. L’exposition prolongée peut être un facteur de risque pour la cataracte (l’opacification du cristallin), la Dégénérescence Maculaire Liée à l’Age (DMLA), qui touche une personne sur quatre après 75 ans, ou le cancer des paupières. Comme pour la peau, les effets sont cumulatifs : chaque exposition non protégée laisse une trace. On parle même de capital solaire oculaire, à ne pas épuiser trop vite. Trois types de rayons ultraviolets émanent du soleil : UVA, UVB et UVC. « Heureusement, les UVC sont arrêtés par la couche d’ozone. Les UVA et les UVB, eux, rentrent dans notre atmosphère. Ils pénètrent dans l’œil à travers la cornée, le cristallin… jusqu’à atteindre parfois la rétine. Même s’ils sont partiellement filtrés par les structures de l’œil, une accumulation quotidienne peut s’avérer toxique. » Et pas question de se sentir protégé quand le ciel est couvert, car 90% des UV traversent les nuages.
Enfants, travailleurs extérieurs… des publics plus vulnérables
Certains publics doivent redoubler de vigilance. « Les enfants, en particulier avant 12 ans, sont les plus exposés : leur cristallin est encore immature et laisse passer davantage d’UV. » Lunettes de soleil certifiées et chapeau à large bord doivent faire partie de la panoplie dès qu’ils mettent le nez à l’extérieur ! Autre population à risque, les professionnels travaillant en extérieur – ouvriers du BTP, agriculteurs, jardiniers…. – qui cumulent des heures d’exposition quotidiennes. Là aussi, des équipements de qualité sont indispensables pour éviter des pathologies précoces. Oui, les lunettes de soleil peuvent être un accessoire de mode. Mais elles sont avant tout essentielles pour la santé de nos yeux. Et doivent être, à ce titre, choisies avec soin.